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Pierre Emmanuel, Evangéliaire, Poèmes, aux éditions du Seuil, 1961

Né à Gan (Basses-Pyrénées), le 3 mai 1916.

Tandis que ses parents émigraient aux États-Unis, Pierre Emmanuel fut élevé à Lyon par un oncle paternel. Après des études de lettres à l’université de Lyon, il entama une carrière d'enseignant.

Venu à la poésie par la lecture de La Jeune Parque de Valéry, il se familiarisa avec les romantiques allemands (Hölderlin) et les auteurs anglais (Hardy, Hopkins). C'est Pierre-Jean Jouve, qu'il rencontra en 1937, qui devait le guider dans ses débuts poétiques ; son premier recueil, Élégies, parut en 1940, mais c'est avec Tombeau d'Orphée (1941) qu'il acquit une véritable reconnaissance.

Réfugié dans la Drôme pendant l'Occupation, il poursuivit ses activités d'enseignant et participa à la Résistance. Cette expérience devait lui inspirer ses poèmes parmi les plus visionnaires, Jours de colère, Combats avec tes défenseurs, La liberté guide nos pas.

L'œuvre poétique de Pierre Emmanuel demeure l'une des plus importante du XXe siècle. On rappellera Le Poète fou, Mémento des vivants, Poésie raison ardente, Qui est cet homme, Car enfin je vous aime, Babel, grande fresque en cinq parties, dans laquelle le poète tente une « épopée spirituelle de l'histoire humaine », La Colombe, Visage nuage, Versant de l'âge, Évangéliaire, Le Poète et son Christ, Le Goût de l'un, La Nouvelle Naissance, La Face humaine, Jacob, Sophia, La Vie terrestre, Tu, Livre de l'homme et de la femme, Una ou la Mort la Vie, Duel, L'Autre, L'Arbre et le vent, Le Grand Œuvre, Cosmogonie.

En marge de ses activités de poète, Pierre Emmanuel exerça également le métier de journaliste, collaborant à Témoignage Chrétien, Réforme, Esprit.

Pierre Emmanuel fut élu à l’Académie française le 25 avril 1968, par 16 voix au quatrième tour, au fauteuil du maréchal Juin. Il fut reçu le 5 juin 1969 par Wladimir d'Ormesson.

En 1975, Pierre Emmanuel se déclarait « démissionnaire » de l'Académie, pour protester contre l'élection de Félicien Marceau.

Mort le 24 septembre 1984. (source : Académie française)

 

 

"Une commande est à l'origine de ce livre : celle, par les Editions du Zodiaque, d'une préface à un album d'Images de la Nativité. Ecrire en dix pages de prose une méditation esthético-religieuse n'inspira guère l'auteur, qui préféra composer une suite d'enluminures sur le thème de Noël. Il y trouva du plaisir, qu'il voulut prolonger en écrivant tout un Evangéliaire.

Un tel travail ne peut aller sans réflexion sur les Evangiles et leur réalité pour un homme de ce temps. C'est pourquoi l'artiste du XXème siècle vient ici doubler l'imagier médiéval et parfois de substitue à lui.

L'intervention du premier est particulièrement manifeste de la Passion au matin de Pâques : les images traditionnelles sont modifiées par le thème moderne de la "mort de Dieu". sans cesser d'être fidèle à lui-même, l'auteur parle tantôt en homme du néant, tantôt en témoin de la foi. C'est sa manière de communier aux angoisses de l'époque, tout en attendant la résurrection de ce mort dont elle a pudeur à prononcer le nom.

L'auteur souhaite qu'on regarde ce livre comme il l'a lui-même conçu : comme un édifice poétique. Libéré des préjugés contemporains sur la nature et l'objet de la poésie, le poète joue et jouit de la richesse, de la souplesse, de la rigueur lumineuse du vers français.

Matthias Stomer (1615-1649), Palais royal de Turin

 

Pierre Emmanuel, Evangéliaire : Adoration des bergers


Immobiles
Nuit après nuit
Ils font silence
Ils écoutent le mouvement du silence
Ils sondent
Les hauteurs du ciel dans leur âme
Et leur âme
Par-delà
Et parfois
À l’orée de leur âme
Ils contemplent comme on fixe le feu
La musique éblouissante de Dieu
Et la flamme monte droit dans leurs yeux
Comme l’échelle des anges
 
Il advient qu’un messager
Partage un instant leur veille
Et leur silence et leur pain
Celui-ci est un Ange
Ils le savent
Ils s’émerveillent
Sans bouger
 
Se recueillent
Dans la gloire de Dieu
Qui tout emplit tel un raz de marée
Tel un vent d’étoiles
Tel un murmure
À la mesure du cœur
 
Se mettent en marche
Les siècles derrière eux
Chantant à Dieu
Un chant plus vaste que la voûte des mondes
Plus secret que l’intime du cœur
Chant de l’attente
Et du chemin
À la mère du Verbe enfant
 
Ces silencieux font l’hommage
De quelques pauvres présents
Et de paroles
Longtemps mûries.

 

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