"C'est à nouveau l'énigme, l'énigme de l’étrangeté, de l'enfance - l'enfance qui en sait plus parce que nulle réponse ne lui convient, prononçant à haute voix - la voix ravissante, ravie au silence qui toujours s'y retient - le non serviam, refus glorieux dans l'acquiescement de l'extrême détresse.
Ne voulant, ne pouvant terminer, je m'en remets pour l'instant à la parole d'un Maître hassidique (qui a toujours refusé d'être Maître), Rabbi Nahman de Braslav.
"Il est interdit d'être vieux !"
Ce qu'on peut d'abord entendre : interdit de renoncer à se renouveler, de s'en tenir à une réponse qui ne remettrait plus en cause la question - finalement (mais c'est sans fin) n'écrivant que pour effacer l'écrit ou plus exactement l'écrivant par l'effacement même, maintenant ensemble épuisement et inépuisable : la disparition qui ne s'exténue pas.
Ainsi en vient-il à n'écrire le Livre secret que pour le brûler, devenant célèbre comme l'auteur du "Livre Brûlé"
(Maurice Blanchot, extrait de "Anacrouse", fragment de "Une voix venue d'ailleurs", Ulysse, Fin de Siècle, 1992. Cité par Marc-Alain Ouaknin, Le Livre brulé, philosophie du Talmud, nouvelle édition revue et corrigée, Editions du seuil, 1994)