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Colette Becker, Lire le Réalisme et le Naturalisme
Colette Becker, Lire le Réalisme et le Naturalisme

Colette Becker, Lire le Réalisme et le Naturalisme, Dunod, 1992

Table des matières :

QU-EST-CE QUE LE REALISME ? : I. L'approche réaliste du réel - II. Eviter les conventions - III. L'illusion réaliste : 1. Procédés d'écriture - 2. Tempérament et objectivité - IV. Problèmes du réalisme - HISTOIRE ET THEORIE : I. La mise en place de l'esthétique réaliste : 1. La tradition de la mimesis - 2. L'évolution du roman, après la Révolution - 3. Les grands initiateurs : Stendhal, Balzac - 4. Facteurs historiques et culturels : L'échec de 1848 : la fin de "l'illusion lyrique", "L'avenir est à la science" (Zola), Les découvertes de la physiologie - II. Le mouvement réaliste: 1. Le rôle de la peinture de Courbet - 2. La bataille du réalisme en littérature : Champfleury : les premiers assauts, Duranty et la revue "Réalisme", 1857 : grandeur et misère du Réalisme - III. Le mouvement naturaliste : 1. Le tournant de 1865 - 2. Quelques jalons - 3. L'évolution du mouvement : La formation : 1865-1876, La grande période du Naturalisme : 1876-1884 - L'éclatement : 1884-1893 - 4. Définitions : le naturalisme, Zola et le roman expérimental - THEMES ET ECRITURE : I. Le choix de la forme : 1. Le roman - 2. Le récit court - 3. L'hésitation sur les genres - II. Quelques thèmes : 1. La gredinerie bourgeoise : argent et hypocrisie - 2. ratages et "émiettements" (Zola) - 3. Maladie et hérédité - 4. Les dangers d'Eros - 5. Adultères et "collages" - 6. Misères sociales - 7. Ville et nature - III. Ecrire le réel : 1. "Ah ! tout voir et tout peindre ! " (Zola) - 2. L'enquête et ses limites : "Traquer le réel avec de l'imaginaire", Imagination romanesque et document - L'expérience mimétique - IV. Stratégie et enjeux littéraires : 1. Effacement du narrateur privilégié et "restriction de champ" : L'incipit, lieu stratégique, La multiplication des points de vue, Trop de détails figent le sens - 2. la mise à mal du héros - 3. La mise à mal de l'intrigue : "Un livre sur rien" (Flaubert), Une tranche de vie (Zola), de la tranche de vie à l'écriture du fragment, La réaction de Zola - 4. L'écriture et la sensation - 5. Les petits faits vrais - 6. Le procès de l'illusion référentielle - Anthologie de Textes I. : Un nouveau regard sur le monde - II. caractéristiques et procédés du roman moderne - III. Questions de style : pour ou contre "l'écriture artiste" : Edmond de Goncourt, Maupassant - IV. Le Naturalisme et la morale - V. Limites du Naturalisme : Huysmans - Annexes : Notions clés, notices biographiques, Tableau chronologique, Bibliographie, Index.

L'auteur :

Colette Becker, professeur de littérature française à l'université de Paris X-Nanterre, est une spécialiste de Zola et du Naturalisme, auxquels elle a consacré sa thèse de doctorat et de nombreuses publications.

Quatrième de couverture :

La représentation de la réalité est une tradition de la littérature occidentale depuis ses origines, bien avant que se développent, après 1848 et en réaction contre le Romantisme, le Réalisme, puis le Naturalisme.

le texte réaliste se donne pour mimétique et documentaire. Il se présente comme une simple intervention dans le contenu des choses. Ce qui ne va pas sans poser de questions. Et d'abord, qu'entendre par "réalité" ? Le regard qui appréhende cette réalité n'étant jamais neutre, est-il possible d'en donner une représentation exacte, objective ?

Tous les tenants d'une esthétique de la représentation s'accordent pour affirmer que le texte réaliste donne l'illusion du réel bien plus qu'il ne le copie. La première question pour le romancier est donc de savoir comment donner cette impression de réalité, comment faire croire que ce qu'il écrit est vérifiable. Cet ouvrage éclaire les réponses apportées à cette interrogation par les écrivains réalistes et naturalistes. En faisant l'historique de ces deux courants, et en étudiant leurs thèmes, il montre comment l'écriture a été le lieu privilégié de leur démarche.

Il s'adresse à tous les étudiants en Lettres, quel que soit leur niveau et plus généralement à tous ceux qui souhaitent préparer examens et concours, en renouvelant leur approche des textes littéraires. Partant du contexte hitorique, social et idéologique, il présente les auteurs les plus importants à l'aide de nombreux extraits commentés. Il est complété par une anthologie, une chronologie et des index."

Avant-Propos :

"Réalisme. Naturalisme. Deux termes qu'il n'est pas aisé de distinguer et qui sont, le premier surtout, parmi les plus galvaudés de notre langue, la source de maints malentendus.

Le plus souvent, on les associe, comme s'ils désignaient deux manifestations successives d'un phénomène continu qui aurait débuté vers 1850, le Réalisme se développant sous le second Empire, le Naturalisme l'affirmant ou l'exagérant après 1870. Ou on les assimile comme le fit Zola, un des premiers qui, en 1881, regroupa sous son drapeau, dans l'armée des "romanciers naturalistes", Balzac, Stendhal, Flaubert, les Goncourt, Daudet, c'est-à-dire ceux qu'on reconnaît comme les initiateurs et les maîtres du roman réaliste. Ou encore, à la suite du critique marxiste Lukacs, on fait du Naturalisme un avatar grossier du Réalisme, un Réalisme abâtardi.

Les grands théoriciens des deux mouvements ne nous aident guère dans notre effort de clarification. "Quant au réalisme - affirme Champleury en 1855, je le regarde comme une des meilleures plaisanteries de l'époque... Le réalisme est aussi vieux que le monde et en tout temps, il y a eu des réalistes ; mais les critiques en employant perpétuellement le mot ont fait une obligation de nous en servir. "Oui, c'est vrai que je me moque, comme vous, de ce mot Naturalisme, aurait-il confié à Edmond de Goncourt qui le rapporte dans son Journal ; et cependant, je le répèterai sans cesse parce qu'il faut un baptême aux choses pour que le public les croie neuves."

La difficulté est d'autant plus grande qu'on parle de réalisme en art comme de réalisme en littérature, de romanciers naturalistes comme de peintres naturalistes, que Huysmans et Zola, ont appelé de leurs voeux, l'un une architecture naturaliste, l'autre une république naturaliste...

Se contenter de dire que le réalisme a succédé au Romantisme et le Naturalisme au Réalisme est peut-être commode,mais relève d'une simplification qui induit en erreur. Il suffit de jeter les yeux sur une chronologie pour se rendre compte que tout a été beaucoup plus complexe et que, dans cette prériode comme dans n'importe quel autre moment de notre histoire littéraire, la règle est le chevauchement des  : mouvements. Barbey d'Aurevilly ne continue-t-il pas, romantique impénitent, d'affirmer, en plein triomphe du Naturalisme, les convictions de sa jeunesse ? Et Zola n'avoue-t-il pas, en septembre 1878 : "Nous tous aujourd'hui, même ceux qui ont la passion de la vérité exacte, nous sommes gangrenés de romantisme jusqu'aux moelles ; nous avons sucé ça au collège derrière nos pupitres, lorsque nous lisions les poètes défendus ; nous avons respiré ça dans l'air empoisonné de notre jeunesse" ("Les Romanciers contemporains", Les Romanciers naturalistes) ?

En fait, la représentation de la réalité est une tradition de la littérature occidentale depuis ses origines, bien avant que se développent, après 1848 et essentiellement en réaction contre le Romantisme, le mouvement réaliste, puis le mouvement naturaliste. Le texte réaliste se donne pour mimétique et documentaire, comme une simple intervention dans le continu des choses. Mais une telle prétention pose de nombreuses questions. Et d'abord : qu'entendre par "réalité" ? Et encore : est-il possible de donner une représentation exacte, objective, totale de la réalité ?

Si réalistes et naturalistes ont, pour l'essentiel, une même attitude devant la vie et l'oeuvre d'art : goût du réel et du présent qu'ils s'attachent à reproduire, et s'ils s'accordent pour affirmer que le texte réaliste donne l'illusion du réel plus qu'il ne le copie, il existe entre les premiers et les seconds des différences capitales qui tiennent aux conditions historiques et socio-culturelles d'émergence des deux mouvements. Le développement du capitalisme, du prolétariat et des grandes villes, les progrès de la science explorant des territoires de plus en plus vastes, offrent aux romanciers naturalistes une méthode d'investigation, des contenus nouveaux (aux marges de la société et aux marges de ce qui était considéré comme le "sain", le "normal" : névroses, folie, dégénérescences ; lois de la thermodynamique, entropie, déperdition) une vision contrastée de l'homme et de la société. D'un côté, le Progrès, les découvertes et leurs applications techniques ; de l'autre, l'image du désordre, de la dégradation, d'une société et d'un homme tels des machines à vapeur surchauffées, qui s'emballent et menacent d'explosion. (...)

Mais appartenir à une génération n'explique pas tout. Il faut, aussi, tenir compte des individualités, des personnalités. On parle de réalisme, de Naturalisme, englobant sous ces termes des écrivains aussi divers que Flaubert, Feydeau, les Goncourt, Zola, Vallès, Huysmans, Maupassant, Daudet, etc., comme si on avait affaire à des mouvements monolithiques. Plutôt que d'envisager le Naturalisme de façon synthétique, comme on tend à le faire actuellement pour éviter la succession des monographies, n'est-il pas plus judicieux, une fois définies des caractéristiques communes, de parler de "Naturalismes" ? N'est-ce pas ce que Mallarmé voulait dire lorsqu'il affirmait, répondant à l'enquête menée par Jules Huret en 1891 sur l'évolution littéraire : "Pour en revenir au naturalisme, il me paraît qu'il faut entendre par là la littérature d'Emile Zola, et que le mot mourra en effet quand Zola aura achevé son oeuvre." Ce jugement, qu'on ne peut accepter totalement, a, du moins, le mérite de rendre compte du rôle capital joué par l'écrivain pour affirmer et populariser une conception nouvelle de la littérature qui eut, autour de lui et après lui, bien des adeptes.

(Colette Becker)

 

 

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