Robin Kirman, Le Bel Avenir (Bradstreet Gate), traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Marina Boraso, Editions Albin Michel, collection 10/18, 2017
Robin Kirman a fait ses études à Yale, où elle a obtenu un diplôme de philosophie. Elle est désormais professeur à Columbia University et partage sa vie entre New York et Tel Aviv. Le Bel Avenir est son premier roman.
Quatrième de couverture :
"Ils étaient jeunes et promis à un bel avenir. C'était avant que l'une de leurs camarades, étidiantes comme eux dans une prestigieuse université américaine, ne soit assassinée sur le campus. Cette tragédie et le scandale médiatique qu'elle a provoqué hantent toujours Giorgia, Charlie et Alice. D'autant que les soupçons visant l'un de leurs professeurs, un homme charismatique et brillant, ne se sont jamais vérifiés. Confrontés aux défis de l'âge adulte et cherchant une explication aux mystères qui entourent le meurtre, ils découvrent peu à peu que leur amitié est faite de secrets et de mensonges. Un premier roman magistral, comparé au premier grand succès de Donna Tartt, Le maître des illusions."
Extrait :
"Debout dans l'ombre de Canaday Hall, près de la grille ouverte, Alice entendait la voix de Charlie amplifiée par le micro. Il parlait d'un ton mesuré propre à rassurer les quelques dizaines d'auditeurs regroupés sur la pelouse, à les convaincre qu'ils comptaient toujours parmi les privilégiés et que leurs bastions demeuraient inviolables. Il lui était échu de présenter au public la jeune fille choisie pour la bourse d'étude et d'énumérer ses innombrables mérites. Comme Julie, elle était issue d'une famille d'immigrants ; comme elle, elle avait étudié dans un lycée public et sortait major de sa promotion. Une fills digne, sans doute, de celle qui reposait maintenant dans un cimetière de Pittsburg, digne aussi de recevoir sa part d'applaudissements - pas assez forts cependant pour couvrir la sonnerie du mobile d'Alice.
C'était un appel de son avocat, qui l'informait que le dernier de ses versements avait été transmis à Mary Wittmer. Il lui rappelait aussi qu'avec de l'argent et de la chance, on bénéficiait parfois d'un nouveau départ, et qu'elle, Alice Kovac, venait officiellement d'acquitter ses dettes. A trente et un ans, seule et fauchée, Alice ne risquait pas de déclencher les applaudissements, mais au moins elle était innocente. Aux yeux de la justice américaine, en tout cas, le verdict le plus sûr qui puisse exister dans ce monde comme dans l'autre." (p.450-451)
Mon avis sur le livre :
Trois étudiants de Harvard : Alice Kovac, Charlie Flournoy et Georgia Calvin gravitent autour de l'énigmatique professeur Rufus Storrow, soupçonné du meurtre d'une étudiante d'origine indienne.
Une construction particulièrement ingénieuse permet de suivre les destins entrecroisés des personnages aux relations ambiguës, entre jalousie et solidarité, amour et rejet.
Une de ces "coming-of-age stories", entre la fin de l'adolescence et l'âge adulte, dont les Américains ont le secret.
La comparaison avec Le maître des illusions de Donna Tartt m'a semblé tout à fait juste en ce qui concerne l'ambiance d'un campus américain de "l'Ivy League" et la perversité raffinée des personnages.
Impossible de lâcher ce livre tant qu'on n'a pas tourné la dernière page, une dernière page qui, loin de répondre à toutes les questions, justifie la réflexion de l'un des personnages de Washington Square d'Henry James : "On ne sait jamais le tout de rien."