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Friedrich Hölderlin (1770-1843)

 

"Je disais en commençant qu’il n’était pas si important de savoir au nom de quelle confession particulière Hölderlin s’exprimait. Disons mieux à présent, s’il est possible : nous devons comprendre de quelle manière le destin du christianisme, et avec lui des trois grandes révélations du Dieu unique, ne se joue pas en vase clos, comme celui d’une religion particulière qui aurait d’abord à sauver ses propres meubles, ni seulement dans son explication avec l’athéisme contemporain dans sa virulence exponentielle.

 

Il ne se joue pas dans le retrait de chacun sur la vie privée et les postulations secrètes du cœur, pas davantage dans les rassemblements de la conviction partagée ou dans les œuvres charitables puisque la charité appartient à tous, mais dans la capacité pour lui d’être de nouveau, comme il le fut aux origines, poème (« toute religion serait, dans son essence, poétique »), à la fois poème intérieur de la fidélité à la Bonne Nouvelle et poème partagé d’une espérance ancrée dans la participation commune à une histoire qui vient de la nuit des premiers temps (de l’aurore du premier Homme) et qui va vers le Retour, vers la Venue enfin, de ce qui fut déjà lumière, et lumière suffisante à changer la face du monde.

 

Hölderlin a raison, nous sommes dans les temps de nuit. Mais cette nuit n’est pas une nuit sans lendemain, c’est celle qui, dans son secret mouvement, demeure fidèle à la promesse déjà entendue et qui attend que le « manque de Dieu », Gottes Fehl, comme dit une version du poème « Vocation de poète », lui soit en aide sous la forme à nouveau de la bénédiction : « Car tels reviennent les Célestes, secouant la profondeur / Hors des ombres descend parmi les hommes leur jour » (« Pain et vin »), « Alors fêtent la Noce hommes et Dieux / Tous les vivants sont de la fête » (« Le Rhin » ). Le nihilisme a sans doute encore de beaux jours devant lui, mais l’humanité ne saurait se suffire longtemps d’une Terre qui n’est plus une Terre dès lors que ne la bénit plus aucun Ciel, et d’un monde qui n’est plus un « monde » en ce que les hommes apparemment n’y parlent plus qu’aux hommes (à supposer qu’effectivement ils parlent) et que les dieux s’y taisent."

 

(Bernard Sichère, A quoi bon des poètes en temps de détresse ?)

 

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