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de gaulleIl faut accepter la France comme une construction mythique (littéraire, poétique, morale et même quasiment religieuse) et aimer (ou haïr) ce mythe.

Il ne peut donc pas y avoir "débat" au sens philosophique sur "l'identité nationale" car le débat "déconstruirait" le mythe... A moins de penser, comme le général de Gaulle, que ce mythe est conforme à la raison, c'est-à-dire d'avoir une idée "théologique" (providentielle) de la nation.

Je suis en train justement de relire de Gaulle en ce moment, cette voix d'outre-tombe sur laquelle certains "gaullistes" voudraient bien refermer définitivement le couvercle :


"Toute ma vie, je me suis fait une certaine idée de la France. Le sentiment me l’inspire aussi bien que la raison. Ce qu’il y a en moi, d’affectif imagine naturellement la France, telle la princesse des contes ou la madone aux fresques des murs, comme vouée à une destinée éminente et exceptionnelle. J’ai, d’instinct, l’impression que la Providence l’a créée pour des succès achevés ou des malheurs exemplaires. S’il advient que la médiocrité marque, pourtant, ses faits et gestes, j’en éprouve la sensation d’une absurde anomalie, imputable aux fautes des Français, non au génie de la patrie. Mais aussi, le côté positif de mon esprit me convainc que la France n’est réellement elle-même qu’au premier rang ; que, seules, de vastes entreprises sont susceptibles de compenser les ferments de dispersion que son peuple porte en lui-même ; que notre pays, tel qu’il est, parmi les autres, tels qu’ils sont, doit, sous peine de danger mortel, viser haut et se tenir droit. Bref, à mon sens, la France ne peut être la France sans la grandeur. "

 

"Il y a un pacte vingt fois séculaire entre la grandeur de la France et la liberté du monde."

 

"Vieille Terre, rongée par les âges, rabotée de pluies et de tempêtes, épuisée de végétation, mais prête, indéfiniment, à produire ce qu'il faut pour que se succèdent les vivants !

Vieille France, accablée d'Histoire, meurtrie de guerres et de révolutions, allant et venant sans relâche de la grandeur au déclin, mais redressée, de siècle en siècle, par le génie du renouveau !"

Voici le point de vue de Sylvie Huguet, que je partage complètement :

"Au risque de sembler idéaliste ou complétement à côté de la plaque , je me résous à penser "qu'être français ", c'est tout d'abord souhaiter l'être parce qu'on aime ou à défaut au moins parce qu'on comprend et accepte ce qui a constitué notre pays : son histoire , ses traditions , sa culture , son patrimoine en général, ses valeurs.

Je repense à de Gaulle qui écrivait dans "Mémoires de guerre" :

"Toute ma vie , je me suis fait une certaine idée de la France. le sentiment me l'inspire aussi bien que la raison. Ce qu'il y a en moi d'affectif, imagine naturellement la France telle la princesse des contes ou la madone aux fresques des murs , comme vouée à une destinée exceptionnelle ( ..)"

La passion de François Mitterrand pour ses terroirs, sa culture, celle de Philippe Seguin pour ses valeurs républicaines montrent assez bien ce qu'être français peut vouloir dire.

Aimer, c'est accepter et servir.

Et peu importe l'origine ou la communauté.

On a demandé à Avignon, au début de la Révolution si ce territoire papal souhaitait devenir français. Ce fut "oui".

On a demandé la même chose à la Sarre après la première guerre mondiale , ce fut " non". La Sarre est allemande.

Dans l'identité française, il y a à la fois l' égalité, le respect entre toutes les "communautés" et l'attachement affectif , raisonné et accepté à la "personne" de la France, avec ses points de fierté et la reconnaissance assumée de ses faiblesses (la colonisation , Vichy...)

En quelque sorte , "pour le meilleur et pour le pire".

Il faut croire en ce qu'est la France pour qu'elle vive et pour que l'identité française prenne sens. Cela ne veut pas dire mépriser d'autres identités sur d'autres sols.

Si le communautarisme, notion plutôt anglo-saxonne se développe, c'est surtout parce que le citoyen français est souvent dans le désamour ou la dénégation de ce qui l'a constitué depuis des siècles.

La mondialisation n'est pas une excuse.

Demandons à un Chinois ou à un Américain ce qu'il ressent pour son pays et quelles valeurs il respecte. Il y a des chances pour qu'il se tire moins de balles dans le pied que nous.

Cela n'empêche pas de se sentir aussi "citoyen européen" pour partager ensemble des droits et une solidarité nouvelle, voire "citoyen du monde"  pour ce qui est de la solidarité internationale envers les pays du sud ou de la question du  "développement durable".

Tout le reste me semble faire mousser le débat pour mieux l'envenimer de manière assez contreproductive."

J'ajouterais, pour ma part, l'amour de la  langue française,  sans laquelle il n'y a ni mémoire commune, ni expression de la volonté de vivre ensemble, ni par conséquent de nation.

D'où évidemment le rôle éminent de l'école où la langue écrite et parlée, véhicule de tous les apprentissages, doit être enseignée à tous les enfants, dès leur plus jeune âge et en fonction de leurs capacités, quelle que soit leur origine sociale, avec le plus grand soin, le plus grand respect et la plus grande rigueur : son orthographe, sa grammaire, sa syntaxe, son vocabulaire, sa musique, ses inflexions, son rythme et sa cadence, en prose et en poésie.

... En attendant que le bon sens reprenne le dessus, puisqu'il est impossible de légiférer en ce domaine, "liberté pédagogique" oblige, et que les enseignants du Primaire proscrivent définitivement la désastreuse méthode "idéo-visuelle", globale ou semi-globale,  au profit de la méthode d'association graphème/phonème, dite méthode "syllabique".

La langue, non celle des technocrates et des politiciens, mais des écrivains et des poètes.

Il est heureusement loin le temps où les instituteurs interdisaient aux enfants de parler "patois" à l'école (même si ce "patois" était  une véritable langue comme le breton ou l'occitan). L'apprentissage d'une langue régionale ne peut nuire, bien au contraire à l'enseignement du français.

Sans oublier les racines de la langue française : principalement le latin et le grec, cet "atelier" de mots "savants".

Qu'est-ce qu'une nation ? demandait Ernest Renan dans une célèbre conférence prononcée à la Sorbonne le 11 mars 1882

lien : http://www.lexilogos.com/document/renan/nation.htm

Un espace, une histoire commune, une "entité spirituelle", mais surtout une volonté de "vivre ensemble" :

(...) "Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n'en font qu'une constituent cette âme, ce principe spirituel. L'une est dans le passé, l'autre dans le présent. L'une est la possession en commun d'un riche legs de souvenirs ; l'autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l'héritage qu'on a reçu indivis. L'homme, messieurs, ne s'improvise pas. La nation, comme l'individu, est l'aboutissant d'un long passé d'efforts, de sacrifices et de dévouements. Le culte des ancêtres est de tous le plus légitime ; les ancêtres nous ont faits ce que nous sommes. Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire (j'entends de la véritable), voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale. Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore, voilà la condition essentielle pour être un peuple. On aime en proportion des sacrifices qu'on a consentis, des maux qu'on a soufferts. On aime la maison qu'on a bâtie et qu'on transmet. Le chant Spartiate : « Nous sommes ce que vous fûtes ; nous serons ce que vous êtes » est dans sa simplicité l'hymne abrégé de toute patrie. (...)"

"Je me résume, messieurs. L'homme n'est esclave ni de sa race, ni de sa langue, ni de sa religion, ni du cours des fleuves, ni de la direction des chaînes de montagnes. Une grande agrégation d'hommes, saine d'esprit et chaude de cœur, crée une conscience morale qui s'appelle une nation. Tandis que cette conscience morale prouve sa force par les sacrifices qu'exigé l'abdication de l'individu au profit d'une communauté, elle est légitime, elle a le droit d'exister. Si des doutes s'élèvent sur ses frontières, consultez les populations disputées. Elles ont bien le droit d'avoir un avis dans la question. Voilà qui fera sourire les transcendants de la politique, ces infaillibles qui passent leur vie à se tromper et qui, du haut de leurs principes supérieurs, prennent en pitié notre terre-à-terre. « Consulter les populations, fi donc ! quelle naïveté. Voilà bien ces chétives idées françaises qui prétendent remplacer la diplomatie et la guerre par des moyens d'une simplicité enfantine. » — Attendons, Messieurs ; laissons passer le règne des transcendants ; sachons subir le dédain des forts. Peut-être, après bien des tâtonnements infructueux, reviendra-t-on à nos modestes solutions empiriques. Le moyen d'avoir raison dans l'avenir est, à certaines heures, de savoir se résigner à être démodé."

 

 


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