Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Corpus

  1. Jean d’Alembert, article « Androïde », L’Encyclopédie, 1751.
  2. Auguste de Villiers de L’Isle-Adam, L’Ève future, 1886.
  3. Image tirée du film Metropolis de Fritz Lang, 1927.
  4. Pierre-Marie Lledo, « Femme, homme, robot : vivre ensemble », 2015.

Synthèse |40 points| 

Vous réaliserez une synthèse objective, concise et ordonnée des documents contenus dans le présent corpus.

Écriture personnelle |20 points| 

  • Sujet 1 : Pensez-vous que l’avenir de l’humanité puisse résider dans un futur où le corps humain fusionnerait avec les machines ? 
  • Sujet 2 : le corps artificiel est-il l’ennemi du corps naturel ?

Vous répondrez à cette question de façon argumentée en vous appuyant sur les documents du corpus, vos lectures de l’année ainsi que vos connaissances personnelles.

Proposition de corrigé de la synthèse de documents :

Introduction

Phrase d'accrocheLa création d'êtres artificiels réels ou imaginaires n'a cessé fasciner les hommes, depuis Talos, le gigantesque robot d'airain gardien de la Crète crée par Dédale pour le roi Minos, jusqu'à Gordon, un robot possédant un cerveau biologique formé de cellules nerveuses prélevés chez un rat, en passant par le Golem protecteur de la communauté juive de Prague, le chevalier artificiel imaginé par Léonard de Vinci ou les automates de  Vaucanson.

Présentation des documentsC'est justement ce dont traite ce corpus composé de quatre documents qui s'étendent du XVIIIème au XXIème siècle. Il s'ouvre sur un article intitulé "L'androïde" de Jean Le Rond d'Alembert, paru en 1751 dans l'Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des techniques, dans lequel est décrit un "Flûteur" (joueur de flûte), un automate inventé, réalisé et exposé en 1738 à Paris par Jacques Vaucanson. Le deuxième est un extrait d'un roman considéré comme l'une des œuvres fondatrices de la science-fiction : L’Ève future d'Auguste de Villiers de L'Isle-Adam, parue en 1886. Il évoque une androïde parfaite dont le concepteur, Edison a déjà crée le bras. Le troisième est une image extraite du film Metropolis de Fritz Lang, sorti en 1927 et représentant une androïde (Maria) mise au point par un savant fou (Rotwang). Le quatrième est une contribution à un ouvrage collectif  de 2015 de Pierre-Marie Lledo, chef du département Neuroscience de l'Institut Pasteur intitulée "Femme, homme, robot : vivre ensemble" dans lequel l'auteur esquisse une histoire des machines androïdes et évoque les interrogations qu'elles soulèvent et les enjeux éthiques et philosophiques qu'elles impliquent.

ProblématiqueComment les avatars des machines androïdes sont-ils évoqués et pensés à travers ces quatre documents ?

Annonce du plan : Trois axes seront abordés : les machines androïdes mécaniques (automates et robots), les machines androïdes à composantes biologiques et enfin les questions éthiques et philosophiques que suscitent ces inventions.

1. Des androïdes mécaniques aux robots autonomes

Dans son article intitulé "Femme, homme, robot, vivre ensemble", Pierre-Marie Lledo retrace succinctement l'histoire des machines androïdes depuis la Renaissance jusqu'à l'époque moderne, en passant par le XVIIIème siècle. Il fait l'éloge du génie inventif de Léonard de Vinci, avec son chevalier "que l'on pouvait placer sur le dos d'un cheval" (on ne sait pas s'il fut effectivement réalisé) et cite Vaucanson dont l'article de d'Alembert évoque le "Flûteur" mécanique. L'auteur distingue deux sortes d'automates mécaniques : les automates capables de reproduire des gestes automatiques et les robots ("robot" vient du mot tchèque "robota" qui signifie "travail", "besogne", "corvée") "qui reproduisent les gestes, mais avec autonomie et un certain degré de liberté, dans la mesure où ils sont capables de s'adapter à leur environnement".

Les machines androïdes mécaniques sont évoquées à travers l'article de d'Alembert dans L'Encyclopédie. Le philosophe des Lumières commence par définir le mot "androïde" : "composé du grec andros, homme et eidos, forme, un androïde est un automate ayant figure humaine et qui, par le moyen de certains ressorts bien disposés, agit et fait d'autres fonctions extérieurement semblables à celles de l'homme". Il insère ensuite un Mémoire de Vaucanson, "approuvé par l'académie royale des sciences", décrivant avec une précision minutieuse l'organisation et les fonctionnalités du joueur de flûte mécanique. Il termine son article par un éloge enthousiaste de l'invention de Vaucanson "que beaucoup de gens traiteraient de chimère si c'était le projet d'une machine à faire et non l'exposition d'une machine exécutée".

2. Des robots mécaniques aux robots hybrides :

Pierre-Marie Lledo explique que l'automate de Vaucanson correspond à la philosophie réductionniste, mécanique et matérialise du siècle des Lumières. Il est capable de mimer un comportement humain (par exemple, jouer de la flûte), mais il n'a ni autonomie, ni capacité d'adaptation.

A l'inverse, l'androïde imaginaire de Metropolis correspond à la deuxième génération des robots évoqués par Pierre-Marie Lledo : les robots polyvalents et autonomes. On peut même dire qu'elle constitue une étape intermédiaire entre les robots de la première génération et ceux de la troisième, dans la mesure ou Rotwang, le "savant fou", lui donne l'apparence d'un être humain véritable, Maria "une ouvrière pauvre et rebelle".

L'extrait de L’Ève future évoque une androïde qui n'a plus grand chose d'un robot tant elle imite à la perfection les caractéristiques de la vie. Edison qualifie son invention de "chair artificielle" et affirme que grâce à la "Fée électricité" et aux rayons solaires, il sera capable de lui donner "tout le fondu, tout le moelleux, toute l'illusion de la vie".

Ce qui était encore du domaine de l'imagination visionnaire chez Fritz Lang et Auguste de Villiers de Lisle-Adam est en train de se concrétiser sous nos yeux avec la création de robots hybrides fonctionnant avec "un véritable petit cerveau biologique". D'ores et déjà, un robot dénommé Gordon, mis au point à l'université de Reading en Grande-Bretagne, non par un seul homme comme Vaucanson, Edison ou Rotwang, mais par l'équipe de Kevin Warwick, possède un cerveau biologique capable de se régénérer, formé de cellules nerveuses prélevées sur un rat.

Une troisième génération de robots est donc en train de voir le jour : "Les robots capables de s'adapter à leur environnement vont devoir s'effacer devant des machines qui deviennent encore plus performantes car inspirées des règles du monde biologique."

3. Interrogations éthiques et philosophiques :

Après avoir présenté le Mémoire de Vaucanson, d'Alembert s'extasie tant sur la finesse et la délicatesse de l'invention de Vaucanson que sur le génie de celui qui a réussi à transformer une "chimère" en réalité.

Fritz Lang, Auguste de Villiers de Lisle-Adam et Pierre-Marie Lledo sont loin de partager son enthousiasme : la légende de l'image extraite du film Metropolis nous explique que Rotwang, l'inventeur de l'androïde prénommé "Maria", est "obsédé" par la création d'un "homme-machine" et le qualifie de "savant-fou" ; le créateur de "l’Ève future" présente des traits tout aussi inquiétants que Rotwang : le narrateur le qualifie "d'effrayant" et dépeint un personnage animé d'un orgueil démesuré qui éclate par instants d'un rire dément. L'intention d'Edison n'est pas seulement de créer des androïdes, mais de rivaliser avec la nature, en créant des êtres parfaits et immortels dont le narrateur laisse deviner qu'ils sont appelés à supplanter l'humanité actuelle.

Persuadé d'être l'inventeur le plus génial de tous les temps, Edison n'a que mépris pour ceux qui l'ont précédé, à commencer par Vaucanson, ces "infortunés" qui, "faute de moyens d'exécution suffisants n'ont produit que des monstres dérisoires".

Pierre-Marie Lledo se demande, de son côté, si les machines androïdes ou humanoïdes seront demain une nouvelle espèce dans la chaîne de l'évolution. Selon lui, l'invention d'outils humanoïdes faits à notre image soulève de véritables questions philosophiques, notamment celle de l'altérité et entraîne  de sérieux enjeux sur le plan éthique. Comment les hommes et les femmes de demain parviendront-ils à vivre avec des robots construits à leur image ?

Conclusion :

Ces documents témoignent de la fascination croissante exercée par les androïdes sur les êtres humains "en chair et en os", à mesure que la différence s'efface. Les philosophes du XVIIIème siècle y voient la preuve du génie inventif potentiellement illimité de l'être humain.  Mais cet optimisme se nuance d'inquiétude, à mesure que l'évolution de la science et de la technique rend possible la création d'êtres artificiels construits à l'image de l'homme. La question désormais n'est plus de savoir comment dépasser les limites du possible, mais comment vivre dans un monde où tout semble possible.

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :