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Dorothy Day, Le coeur et la conscience de gauche du catholicisme américain

C'est à Richard Kearney (Dieu est mort, vive Dieu, Une nouvelle idée du sacré pour le IIIème millénaire : l'anathéisme) que je dois la découverte de la vie et de la pensée de cette femme extraordinaire qui fut, selon le magazine Newsweek, le "coeur et la conscience de gauche du catholicisme américain". Richard Kearney lui consacre, aux côtés de Jean Vannier et de Gandhi, toute une partie du chapitre 7 de son livre sur "l'anathéisme" (p. 292-302) : "En acte. Entre le Verbe et la chair"

Extrait :

"Dorothy Day était une chrétienne qui pensait que Dieu habitait les sans-abri des quartiers déshérités qui défigurent le centre des villes. Elle travaillait avec eux jour après jour. Elle leur donnait du pain et de l'eau, un toit et des soins. Elle avait une action politique, mais pas dans le sens d'un gouvernement qui manipule (telle la coalition chrétienne des années Bush) ou un gouvernement qui dirige (comme dans la collusion entre l'Eglise et l'Etat connue sous le nom de césaro-papisme).

La politique de Day était celle d'un corps souffrant et agissant. Elle déclinait au quotidien des actes d'amour et de justice, transfigurant la misère en soins, l'hostilité en hospitalité. En cela elle ressemblait à la politique d'émancipation promue par les fameux théologiens de la libération en Amérique latine, une politique qui était non pas celle du pouvoir d'Etat ou d'une idéologie de parti, mais celle d'une vie sacramentelle dans l'ici et maintenant. Day avait pour amis, à New York, ces rebelles que furent les frères Berrigan, infatigables militants des droits civiques et les sans-abri de Harlem. Par son livre, La Longue Solitude et d'autres écrits, nous découvrons une femme chrétienne engagée dans la réalité du combat pour émanciper la vie des pauvres de ce qu'elle voyait comme le principe de mort promu par l'avidité capitaliste sans limite..." (Richard Kearney, Dieu est mort, vive Dieu, Une nouvelle idée du sacré pour le IIIème millénaire, l'anathéisme, p.292-293)

Article de Sophie de Villeneuve (La Croix) sur Dorothy Day :

"Après une jeunesse mouvementée et une conversion surprenante, Dorothy Day (1897-1980) devient une des personnalités catholiques les plus marquantes des États-Unis. Son journal, «The Catholic Worker», a défendu le droit des ouvriers et fait connaître l'enseignement social de l’Église.

Elle était, selon «Newsweek», « le cœur et la conscience de gauche du catholicisme américain». Après sa mort, sa réputation aux États-Unis n'a pas diminué, même si, pendant plus de cinquante ans, cette journaliste combattante a suscité bien des controverses. Dans la lignée d'Albert de Mun, puis du mouvement français des prêtres-ouvriers, Dorothy Day a contribué à porter l'étendard de la défense des pauvres et des exclus du pays le plus rlche du monde. Sa jeunesse ne fut pourtant pas un exemple de tempérance. Beuveries, orgies, sexe... Dorothy elle­ même se trouve souvent en porte-à-faux avec un passé que jamais elle n'a nié, mais qu'elle évoque avec hésitation. Pour une jeune fille plutôt rangée des années 20, cette existence surprend. Mais c'est dans l'errance d'une adolescence tourmentée qu'il faut chercher les racines de Dorothy. Très jeune, elle quitte la maison familiale, prend son indépendance et se tourne résolument vers le marxisme. Déjà, un amour irrésistible pour la condition de vie ouvrière et les opprimés de l'industrialisation la porte.

De petits métiers en travaux précaires, Dorothy découvre la pauvreté, la vie usante des classes laborieuses. Elle se découvre également des dons pour l'écriture et se lance dans le journalisme, dans des journaux socialistes, dès 1916 . «Je voulais aller rejoindre les piquets de grève, je voulais aller en prison, écrire, influencer les autres et laisser ma marque sur le monde.»

En 1917, elle participe avec des suffragettes aux manifestations contre l'entrée en guerre des États-Unis. Elle fait à cette occasion un séjour en prison qui la marque à vie. En 1919, elle se retrouve enceinte et se fait avorter. Là encore, cet acte lui laissera le goût amer d'une lente descente aux enfers. Sa vie débridée à New York la met dans un état d'intense insatisfaction. Les doutes sur son existence l'assaillent. En 1925, Dorothy a la grande joie d'accoucher d'une petite fille, Tamar, qui tiendra une place privilégiée dans son existence. À l'étonnement général, elle se tourne vers Dieu et la religion catholique, qu'elle avait pourtant si ardemment combattue. Et, en 1927, elle se fait baptiser. Sa conversion ne lui fait pas abandonner certaines de ses convictions, mais elle renonce à sa vision marxiste de la société : "J'étais toujours opposée au capitalisme et à l'impérialisme et voilà que je passais à l'opposition. Mais je voulais être pauvre, chaste et obéissante. J'aimais, et comme toute femme qui aime, je voulais être unie à mon amour".

Sa rencontre avec Pierre Maurin, un philosophe ouvrier itinérant, bon connaisseur de l'enseignement social de l’Église, lui permet de trouver enfin sa voie. Jusqu'à sa mort en novembre 1980, Dorothy essaie, souvent avec succès, de faire se rencontrer ses valeurs religieuses et politiques. Le Mouvement catholique ouvrier, créé avec Pierre Maurin, est à l'origine du combat pour la justice sociale défendu par les catholiques américains. Sans relâche, Dorothy plaide pour la paix, le souci des chômeurs, et «l'esprit de don». Ses «Maisons de l'hospitalité», créées aux quatre coins du pays, accueillent et nourrissent des milliers de chômeurs, mis sur le pavé par la crise de 1930. Les «fermes communautaires» accueillent bon nombre d'enfants défavorisés. Mais c'est à travers son journal, "Catholic Worker" qui paraît tout au long du siècle, qu'elle fait prendre conscience aux catholiques américains de leur responsabilité envers les pauvres. Travaillant sans cesse, Dorothy puise dans sa dévotion aux saints et à la Vierge la force de continuer.Taxée à tort de marxiste, elle conserve jusqu'au bout sa croyance indéfectible en l'autorité doctrinale de Rome. D'un grand respect envers la hiérarchie ecclésiale, et fondant toujours son action sur les Évangiles, elle est celle qui a su convaincre les Américains de la force de l'enseignement social de l’Église. (source : Sophie de Villeneuve, La Croix, Croire, Questions de vie, question de foi)

BIOGRAPHIE

1897 : Naissance à Brooklyn.
1917 : Séjour en prison.
1927 : Conversion et baptême.
1932 : Rencontre de Pierre Maurin. 
1933 : Création du «Catholic Worker», du Mouvement catholique ouvrier et de l'école ouvrière.
1934 : Ouverture de la première ferme communautaire.
1965 : Voyage officiel au Vatican.
1980 : Mort à New York.

 

  

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