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Marc-Alain Ouaknin, Bibliothérapie (Lire, c'est guérir) - Le blog de Robin Guilloux
Marc-Alain Ouaknin, Bibliothérapie, Lire, c'est guérir, Editions du Seuil, 1994 Marc-Alain Ouaknin, né le 5 mars 1957 à Paris, est un rabbin, un philosophe et un écrivain français. Docteur en...
Marc-Alain Ouaknin, Le Livre brûlé, Philosophie du Talmud, nouvelle édition revue et corrigée, Le Lieu commun, Editions du seuil, 1994
Photo de couverture : enfants étudiant la Tora, Trnava, Tchékoslovaquie, 1937. L'auteur de cette photo, Roman Vishniac dit : "Je devrais l'intituler "Les Visages de l'étude".
Marc-Alain Ouaknin, né à Paris en 1957, rabbin et docteur en philosophie, auteur de nombreux ouvrages et articles sur la pensée juive, est directeur du centre de recherches et d'études juives ALEPH (Paris) et enseigne la philosophie et la littérature comparée.
"Il est interdit d'être vieux !" (Rabbi Nahman de Braslav)
"Que jamais la voix de l'enfant
En lui ne se taise, qu'elle tombe
Comme un don du ciel offrant
Aux mots desséchés l'éclat de son
Rire, le sel de ses larmes, sa toute-
Puissante sauvagerie
(Louis-René des Forêts, Ostinato)
Maurice Blanchot (1907-2003)
"C'est à nouveau l'énigme, l'énigme de l'étrangeté, de l'enfance - l'enfance qui en sait plus parce que nulle réponse ne lui convient, prononçant à haute voix - la voix ravissante, ravie au silence qui toujours y revient - le non serviam, refus glorieux dans l'acquiescement de l'extrême détresse.
Ne voulant, ne pouvant terminer, je m'en remets pour l'instant à la parole d'un Maître hassidique (qui a toujours refusé d'être Maître), rabbi Nahman de Braslav.
"Il est interdit d'être vieux !"
Ce qu'on peut d'abord entendre : interdit de renoncer à se renouveler, de s'en tenir à une réponse qui ne remettrait plus en cause la question - finalement (mais c'est sans fin - n'écrivant que pour effacer l'écrit ou plus exactement l'écrivant par l'effacement même, maintenant ensemble épuisement et inépuisable : la disparition qui ne s'exténue pas.
Ainsi, en vient-il à n'écrire le livre secret que pour le brûler, devenant célèbre comme l'auteur du "Livre brûlé". (Maurice Blanchot, extrait de "Anacrouse", fragment de "Une voix venue d'ailleurs", Ulysse, Fin de Siècle, 1992)
"A côté de la Bible - la Loi écrite - le Talmud, depuis sa clôture vers l'an 500 de notre ère, constitue la Loi orale, l'enseignement jamais interrompu de la tradition juive, sa mémoire et les racines de sa culture. Le Livre brûlé se déploie en trois livres : le premier présente une introduction systématique à l'univers talmudique, à ses méthodes, à ses débats, à sa logique, à son histoire.
Le deuxième, qui commente deux textes importants de la Michna et de la Guémara, offre un modèle d'étude séculaire confronté aux réflexions philosophiques contemporaines.
Le troisième enfin, qui donne son nom à l'ouvrage, interroge la figure énigmatique et puissante d'un maître hassidique, Rabbi Nahman de Braslav, qui, sentant la mort venir, détruisit par le feu un de ses écrits...
Trois livres qui en suscitent d'autres, à l'infini, et qui posent la même question : ne faut-il pas, au fond, "détruire" les livres pour donner naissance à la pensée, pour créer le renouvellement du sens ? Pour que la fidélité aux écritures ne se pétrifie pas en respect têtu et en refus aveugle du temps et de l'Histoire.
Car, comme dit R. Nahman de Braslav : "Il est interdit d'être vieux." (note de l'éditeur)
Extrait de l'avant-propos
"Le "Livre brûlé" se présente comme une défense de la subjectivité fondée sur la capacité à retrouver une "parole parlante", malgré l'existence des textes, du pouvoir politico-religieux.
Nous avons tenté l'exposition des moyens qui rendent possible le passage du "Livre" à la parole. Il faut ici, dans cet avant-propos, nous dédire de la première phrase de notre texte qui peut conduire à certaines méprises ; nous avons écrit "Au commencement est le Livre". Le Livre est certes bien au commencement ; au commencement seulement... Après le commencement, il y a un travail de déconstruction du livre, passage d'une loi écrite à une loi orale...
L'histoire du Livre est l'histoire de son effacement, et l'homme est "condamné" à interpréter. Et le peuple juif n'est pas le peuple du Livre !
Effacement particulier qui n'est pas nécessairement effacement du texte puisque - paradoxe - cet effacement a lieu par l'ajout de paroles, de textes supplémentaires. Il y a plutôt effacement de la maîtrise du discours, de la violence portée par le discours. Effacement non silencieux, puisqu'il faut des mots pour que le discours se taise.
Et peut-être est-il question d'autres choses encore... Certainement, d'ailleurs. Il suffit alors de lire ce livre comme une introduction au Talmud, où nous répondons à la question toute simple : "Qu'est-ce que le Talmud ?" Texte souvent cité mais rarement lu et compris : introduction historique et méthodologique suivie de deux exemples, deux textes talmudiques dont nous présentons le texte hébraïque, la traduction et un commentaire. Deux "ouvertures" qu'il ne faut pas lire, mais travailler, étudier, méditer, reposer, reprendre, reprendre encore... C'est-à-dire qu'il est nécessaire, pour le lecteur, d'essayer sa propre interprétation, sa propre réflexion, avant de s'engager dans les méandres de nos interprétations.
Après cette introduction et ces exemples, un périple nous mènera vers la pensée d'un maître original qui nous a posé l'énigme du "Livre brûlé"
Dans ce livre, nous avons invoqué plusieurs auteurs souvent contemporains, en dehors des Maîtres du talmud.
Est-il utile d'entrer dans un débat sur l'interprétation ? Les auteurs invoqués avaient-ils vraiment les intentions que nous leur avons prêtées ? Qui sait ?
Le seul critère d'une interprétation, c'est sa fécondité. Tout ce qui donne à penser honore celui qui l'offre...