Saint Augustin, Les Confessions, traduction, préface et notes par Joseph Trabucco, Garnier-Flammarion, 1964
"Toute la vie de saint Augustin se déroule sur cet arrière-fond, le Bas-Empire, le premier en date des Etats totalitaires de type moderne, et c'est là, pour le lecteur d'aujourd'hui, la première valeur de son enseignement : il nous apprend par son exemple, un art de vivre par temps de catastrophe." (Henri-Irénée Marrou)
Augustin d'Hippone ou saint Augustin, dont le nom latin est Aurelius Augustinus, né le à Thagaste (aujourd'hui Souk Ahras en Algérie) et mort le à Hippone (aujourd'hui Annaba en Algérie), est un philosophe et théologien romain et amazigh originaire d'Afrique romaine qui, après une carrière de rhéteur, occupe la fonction d'évêque à Hippone. Canonisé en 1298, il est avec Ambroise de Milan, Jérôme de Stridon et Gégoire le Grand, l'un des quatre premiers Pères de l'Eglise latine à se voir conférer le titre honorifique de docteur de l'Eglise.
Extrait de la préface de Joseph Trabucco :
"Notre époque, peu théologisante, mesure mal la grandeur de l'oeuvre d'un saint Augustin. S'en soucie-t-elle seulement ? La somme des notions qu'un bachelier moyen possède sur le plus grand des Pères de l'Eglise, à mettre les choses au mieux, se réduit, je crois, à ceci : une image, le tableau d'Ary Scheffer ; deux titres de livres, l'un du maître, Les Confessions, l'autre d'un lointain disciple, l'Augustinus ; peut-être encore le mot célèbre : "Nondum amabam et amare amabam". C'est tout, et, il faut en convenir, c'est peu.
Car la tête de saint Augustin a été le lieu, non pas unique, mais privilégiée, d'une des opérations majeures de l'esprit humain. C'est à lui, plus qu'à aucun autre, qu'il fut donné de réaliser la synthèse de la pensée antique et de la pensée chrétienne, dont a vécu de longs siècles, la civilisation occidentale. Par lui, en lui, la culture gréco-latine fait alliance avec la Bible, la sagesse platonicienne donne la main à la "folie de la croix", une tradition nouvelle se crée, qui portera, nourrira, fera fructifier les plus beaux génies du genre humain.
Du point de vue spécifiquement chrétien, il fut le docteur incomparable que l'Eglise a mis sur ses autels, un des ouvriers les plus actifs du progrès des dogmes, le théoricien de la chute, de la réparation, de la grâce. Disputeur jamais las, tandis qu'il réfute les manichéens, donatistes, pélagiens, ariens, il précise et définit la doctrine, et, comme la rigueur de la conception ne va pas sans celle du vocabulaire, il achève de donner à la théologie son langage.
On ne s'attend pas à trouver ici une analyse, même abrégée, de cet immense travail. Les curieux de spéculations se reporteront aux ouvrages spéciaux. Ils y verront, au surplus, l'extraordinaire influence exercée par la pensée dAugustin sue les développements ultérieurs de la pensée religieuse. Quelque épisodes, comme la Réforme et le Jansénisme, en furent trop considérables pour n'être point connus des simples "honnêtes gens".
Une pensée si puissante emprunte le plus sûr de sa force au foyer d'un grand coeur. Augustin, en effet, brûla de tous les feux de la vie. VIe double : selon la nature et selon quelque chose qui la dépasse. C'est cette ardente ardeur qui garde aux Confessions la fleur de jeunesse que, depuis quinze cents ans, viennent y respirer, d'âge en âge, les "amateurs d'âme".
Les Confessions, on le sait, content la plus passionnante aventure spirituelle : la quête de Dieu. Une âme, à travers les biens crées, d'illusion en illusion, de peine en peine, y cherche anxieusement le seul Bien qui soit égal à son inquiétude, jusqu'à ce que, l'ayant trouvé, elle s'y repose. D'autres convertis illustres, Pascal, Maine de Biran, Newman, après Augustin, nous décriront à leur tour, leur itinéraire vers Dieu. Mais c'est Augustin qui, le premier, leur a montré la route.
Ce livre, plein de Dieu est en même temps un livre très humain. Par là encore les Confessions sont assurés de trouver toujours des amis. Avant d'être un saint, Augustin a été un homme comme nous, l'un de nous. Il a connu les faiblesses les plus communes. Les Confessions ne nous laissent rien ignorer de sa sensualité. Elle fut le dernier obstacle à la grâce. Jusqu'au bout, ses vieilles amies les passions, le tirèrent, nous dit-il, par son vêtement de chair. Il n'a été étranger à aucun sentiment de la terre. L'amitié lui fut douce. Il l'a aimée jusqu'à ressentir la perte d'un ami avec une sorte de désespoir. Il a eu le goût des larmes. Il a été fou de savoir et de poésie. Adolescent imaginatif et inquiet, il nous a dit ses premiers émois : "Nondum amabam..." Cette phrase, d'autres où il nous montre sa jeune rêverie se nourrissant des prestiges de la poésie virgilienne, nous enchantent encore, après quinze cents ans..."
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