/http%3A%2F%2Fimg.timeinc.net%2Ftime%2Feurope%2Fmagazine%2F2007%2F1210%2F360_eco_1210.jpg)
Umberto Eco, de Superman au Surhomme - Le blog de Robin Guilloux
Umberto Eco, De Superman au Surhomme, (Il Superhuomo de Massa), traduit de l'italien par Myriem Bouzaher, 1978, Editions Grasset et Fasquelle, 1993 Umberto Eco est né à Allessandria (Piémont) en...
http://lechatsurmonepaule.over-blog.fr/2015/09/umberto-eco-de-superman-au-surhomme.html
Les aventures d'Arsène Lupin gentleman-cambrioleur, 813, La double vie d'Arsène Lupin, Les trois crimes d'Arsène Lupin, Les confidences d'Arsène Lupin, Hachette/Gallimard, 1961
L'auteur :
Marie Émile Maurice Leblanc est un écrivain français né le 11 décembre 1864, à Rouen, et mort le 6 novembre 1941, à Perpignan. Auteur de nombreux romans policiers et d’aventures, il est le créateur du célèbre personnage d’Arsène Lupin, le gentleman-cambrioleur. Relégué au rang de « Conan Doyle français », Maurice Leblanc est un écrivain populaire qui a souffert de ne pas avoir la reconnaissance de ses confrères mais a toujours suscité un solide noyau d'amateurs et de quelques "lupinologues". On peut visiter la maison de Maurice Leblanc, "Le Clos Lupin" à Étretat, dans la Seine-Maritime. L’aiguille d’Étretat forme d’ailleurs l’un des décors du roman L'Aiguille creuse. La revue d'études lupiniennes L'Aiguille preuve est éditée annuellement par l'Association des Amis d'Arsène Lupin (AAAL) fondée en 1985 par le philosophe et essayiste François George.
Résumé de la première partie, "La double vie d'Arsène Lupin" :
Tout commence par une série de meurtres dans un hôtel chic parisien. C'est d'abord M. Kesselbach qui est assassiné, et tous les soupçons semblent se porter sur Arsène Lupin, qui pourtant ne tue jamais, mais il faut bien une première fois, comme dirait Gannimard. Le préfet de police Lenormand, ancien de Cochinchine, mène l'enquête et ne croit pas à la thèse défendue par le juge d'instruction, celle de la culpabilité de Lupin. Il se lance donc avec ses hommes sur la piste des mystérieux criminels : le tueur au couteau effilé, et son complice, le major Parbury, alias le boxeur espagnol Ribeira, alias le baron Altenheim. Les indices s'accumulent : une étiquette bordée de bleu portant le chiffre 813, les lettres APOON, puis une nouvelle étiquette avec le chiffre 813, un homme mystérieux au doigt coupé... Un récit compliqué, mais bien maîtrisé où s'entrecroisent Lupin, Lenormand, l'affreux L.M., le baron Altenheim mais aussi le prince Sernine. Dénoncé à la police par le mystérieux L.M., Lupin-Sernine est jeté en prison... Jusqu'au coup de théâtre qui clôt la première partie. (source : Edition de Londres)
L'oeuvre :
"813 commence par le meurtre d’un multimillionnaire de l’époque, M. Kesselbach, apparemment commis par un mystérieux L.M., identifié grâce à un étui à cigarettes découvert par le garçon d’étage. Mais au moment où il allait le montrer à M. Lenormand, inspecteur de la police, il est assassiné. Un deuxième assassinat se produit ensuite, car Chapman, secrétaire de M. Kesselbach, était témoin de la scène. Contrairement aux volumes précédents des histoires d'Arsène Lupin qui étaient parus en feuilleton dans Je sais tout, il est publié dans le quotidien Le Journal, un des plus importants de l'époque, de mars à mai 1910. Le volume est sorti dès le mois de juin 1910 aux éditions Lafitte. Il sera réédité en 1917 en deux volumes intitulés 813 et Les Trois Crimes d'Arsène Lupin. Le texte est modifié pour accentuer l'aspect anti-germanique, Première Guerre mondiale en cours oblige. On trouvera ensuite le premier volume sous le titre La Double Vie d'Arsène Lupin. Le ton de ce roman est assez différent des trois premiers : on a affaire à un Arsène Lupin complexe, inquiétant, dont l'objectif n'est ni plus ni moins que de dominer l'Europe. 813 contient aussi un nombre assez grand de morts violentes, et un ennemi redoutable, invisible et particulièrement inquiétant : L.M. C'est en référence à ce roman que l'association des amis de la littérature policière s'est appelée 813 d'autant qu'elle est statutairement limitée à 813 membres."
Umberto Eco, lecteur de Maurice Leblanc :
"Si Lupin séduit ses contemporains, c'est que Maurice Leblanc (par calcul ou par absorption inconsciente de l'air du temps) fait de son gentleman cambrioleur l'incarnation du héros français, le représentant d'une énergie, d'un élan vital, d'un goût pour l'action associé à un respect de la tradition. Autrement dit, on retrouve chez Arsène Lupin, de façon très évidente, plusieurs théories : Sorel (l'énergie créatrice, la polémique contre la bonasserie et la stupidité de la bourgeoisie, la construction volontariste d'un mythe), Bergson (un "élan vital" interprété du point de vue du surhomme et inspiré, justement, de Sorel), ou encore Maurras (la condamnation de l'accumulation de l'argent, un certain sens mystique de la tradition française)." (Umberto Eco, De Superman au Surhomme, p.106)
Note : la fin de 813 confirme l'analyse d'Umberto Eco. Après avoir songé au suicide, Lupin s'engage dans la légion étrangère : "- Puisque la mer n'a pas voulu de moi, ou plutôt puisque, au dernier moment, je n'ai pas voulu de la mer, nous allons voir si les balles des Marocains sont plus compatissantes. Et puis, tout de même, ce sera plus chic... Face à l'ennemi, Lupin, et pour la France !" (Les aventures d'Arsène Lupin, tome 3, Hachette/Gallimard, 1961, p.427)
Mon avis sur le roman :
Je suis en train de relire avec le même plaisir ce roman de Maurice Leblanc, considéré, à juste titre, comme son meilleur et qui, contrairement à moi, n'a pas pris une ride ! (Arsène Lupin non plus, dont les aventures se déroulent sur trente ans et qui, comme Tintin, ne vieillit pas)... Disparu depuis quatre ans à la suite du dénouement tragique de L'Aiguille creuse, Lupin réapparaît sous une autre identité (je ne dirai pas laquelle) et entraîne le lecteur dans une aventure pleine de suspens et de rebondissements. L'histoire est plus sombre et plus tragique que les autres (à part la fin de L'Aiguille creuse), assombrie par des crimes injustement attribués à Lupin (on devrait savoir que "Lupin ne tue pas") et hantée par la silhouette insaisissable d'un criminel impitoyable. On retrouve dans cette histoire la marque de fabrique des aventures du "gentleman cambrioleur" : la dimension géographique et l'arrière-plan historique de l'intrigue, les cryptogrammes ("L.M", "Apoon", "813"...). Les identités multiples, les évasions impossibles, les coups de théâtre et les révélations ahurissantes... L'écriture haletante et nerveuse (de nombreuses phrases simples en asyndète, pas de verbes de déclaration dans les dialogues) est essentiellement au service de l'action, une action qui se hisse aux dimensions "kolossales" de la géo-politique mondiale avec la présence dans le roman du Kaiser en personne. Fallait oser !