Cynthia Fleury, Ci-gît l'amer, Guérir du ressentiment, essai, NRF Gallimard, 2020.
Table des matières :
I. L'amer Ce que vit l'homme du ressentiment : 1. Universelle amertume - 2. L'individu et la société face au ressentiment. Le grondement de la rumination - 3. Définition et manifestations du ressentiment - 4. Inertie du ressentiment et ressentiment-fétiche - 5. Ressentiment et égalitarisme. La fin du discernement - La mélancolie de l'abondance - 7. Ce que Scheler enseignerait au care - 8. Féminité du ressentiment ? - 9. La faux self - 10. La membrane - 11. La nécessaire confrontation - 12. Le goût de l'amertume - 13. Mélancolique littérature - 14. La foule des êtres manqués - 15. La faculté d'oubli - 16. Espérer du monde - 17. Le tragique de la thiase - 18. La grande santé : choisir l'Ouvert ; choisir le Numineux - 19. Continuer à s'étonner du monde - 20. Bonheur et ressentiment - 21. Défendre les faibles contre les forts - 22. Pathologies du ressentiment - 23. Humanisme ou misanthropie ? - 24. Lutter contre le ressentiment par l'analyse - 25. Redonner de la valeur au temps - 26. Dans le contre-transfert et la cure analytique - 27. Aux sources du ressentiment, avec Montaigne - II. Fascisme aux sources psychiques du ressentiment collectif : 1. Exil, fascisme et ressentiment. Adorno I. - 2. Capitalisme, réification et ressentiment. Adorno, II. - 3. Connaissance et ressentiment - 4. Ecriture constellaire et hébétude. Adorno, III. - 5. L'insincérité des uns, l'habileté des autres - 6. le fascisme comme peste émotionnelle. Wilhelm Reich, I. - 7. Le fascisme en moi. Wilhelm Reich II - 8. Lectures historiennes et psychismes contemporains - 9. La vie comme création : l'Ouvert est le salut - 10. L'hydre - III. La mer, un monde ouvert à l'homme : 1. La déclosion selon Fanon - 2. l'universel au risque de l'impersonnalité - 3. Soigner le colonisé - 4. La décolonisation de l'être - 5. Restaurer la créativité - 6. Thérapie de la décolonisation - 7. Un détour par Cioran - 8. Fanon thérapeute - 9. Reconnaissance de la singularité - 10. Santé individuelle et démocratie - 11. L'atteinte au langage - 12. Des recours à la haine - 13. Le mundus inversus : conspirationnisme et ressentiment - 14. Vers un élargissement du Moi, I - 15. Ce que la séparation signifie - 16. Vers un élargissement du Moi, II : la démocratie, système de valeurs ouvert - 17. L'homme du souterrain : résister à l'abîme.
L'auteur :
Cynthia Fleury, philosophe et professeur titulaire de la chaire "Humanités et Santé" au Conservatoire national des arts et métiers. Titulaire de la chaire de de "Philosophie de l'hôpital" du GTU Paris Psychiatrie et Neurosciences, elle poursuit ici son travail autour de l'individuation et de l'Etat de droit, entamé avec les pathologies de la démocratie. La fin du courage, Les irremplaçables et Le soin est un humanisme.
Quatrième de couverture :
"La philosophie politique et la psychanalyse ont en partage un problème essentiel à la vie des hommes et des sociétés, ce mécontentement sourd qui gangrène leur existence. Certes, l'objet de l'analyse reste la quête des origines, la compréhension de l'être intime, de ses manquements, de ses troubles et de ses désirs. Seulement il existe ce moment où savoir ne suffit pas à guérir, à calmer, à apaiser. Pour cela, il faut dépasser la peine, la colère, le deuil, le renoncement et, de façon plus exemplaire, le ressentiment, cette amertume qui peut avoir notre peau alors même que nous pourrions découvrir son goût subtil et libérateur. L'aventure démocratique propose elle aussi la confrontation avec la rumination victimaire. La question du bon gouvernement peut s'effacer devant celle-ci : que faire, à quelque niveau que ce soit, institutionnel ou non, pour que cette entité démocratique sache endiguer la pulsion ressentimiste, la seule à pouvoir menacer sa durabilité ? Nous voilà, individus et Etat de droit, devant un même défi : diagnostiquer le ressentiment, sa face sombre, et résister à la tentation d'en faire le moteur des histoires individuelles et collectives." (souce : sauramps médical)
Le livre :
"Dans la suite des livres précédents traitant de l'individuation, de l'Etat de droit (La fin du courage, 2011 et Les Irremplaçables, 2015), et des rapports pathologiques entre ces deux dynamiques, ce nouvel essai revient ici plus spécifiquement sur la question du ressentiment.
Dans une première partie, l'auteure opère un retour clinicien : pour un patient en analyse, l'objet de la cure n'est pas seulement la vérité mais la vérité capacitaire, autrement dit, la lutte contre le ressentiment personnel et la possibilité de faire quelque chose de sa souffrance. C'est à une approche capacitaire de la vulnérabilité à développer. L'auteure entreprend de se réinscrire dans une historiographie des philosophes psychanalystes ou des psychiatres rompus à la phénoménologie : Cassirer, Binswanger, Jaspers, etc. Il s'agit de définir une spécificité de l'analyse, son fonctionnement individuel et collectif, ou comment les analysants s'analysent entre eux via leur analyste. Donc une première partie autour de la clinique individuelle du ressentiment et de sa sublimation, et des ferments déjà « politiques » de la psychanalyse.
Une deuxième partie, qui renvoie aux processus collectifs du ressentiment, très actifs à l'heure d'aujourd'hui dans le monde contemporain et mondialisé. Soigner, Gouverner, Eduquer. Cynthia Fleury développe ce continuum-là bien posé par Freud et d'autres. Là aussi, en quoi l'Etat de droit, le gouvernement démocratique n'est pas seulement une procédure institutionnelle, de scrutin, mais nécessairement un « soin », un prendre soin des individus pour éviter qu'ils ne basculent dans le ressentiment et ne soient dès lors plus à même de protéger l'Etat de droit. Avec ce nouveau projet, Cynthia Fleury avance dans cette veine qui lui est spécifique et qui se situe à la croisée de la philosophie, de la psychanalyse et de la politique..."
Exergue :
"il y a ici une décision, un parti pris, un axiome : ce principe intangible, cette idée régulatrice, c'est que l'homme peut, que le sujet peut, que le patient peut. Il ne s'agit pas d'un vœu pieux ni d'une vision optimiste de l'homme. Il s'agit d'un choix moral, et intellectuel, au sens où le pari est posé que l'homme est capable, et surtout le respect dû au patient est également posé de ce côté-ci : il peut, il est agent, l'agent par excellence. Personne ne se dédouane de sa responsabilité, mais personne ne nie à autrui sa capacité d'affronter le réel et de sortir du déni. La vie, dans son quotidien le plus banal, vient tout autant contredire cela que l'affirmer. cela fait longtemps que je ne me fie plus aux seuls faits pour conduire cette forme que l'on appelle une vie. La lutte contre le ressentiment enseigne la nécessité d'une tolérance à l'incertitude et à l'injustice. Au bout de cette confrontation, il y a un principe d'augmentation de soi."