Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

 

Levinas.jpg

Emmanuel Lévinas, Ethique et Infini, Fayard (France-Culture), collection l'Espace intérieur

Salomon Malka, Lire Lévinas, aux éditions du cerf

"Abriter toute l'humanité de l'homme dans la cabane, ouverte à tous les vents, de la conscience." (Nom propres, éd. Fata Morgana, pg. 178)

Légèrement remaniés et complétés pour l'édition, les entretiens présentés dans ce volume entre Emmanuel Lévinas et Philippe Nemo ont été enregistrés et diffusés sur France-Culture en février-mars 1981. 

Présentation succincte de la philosophie d'Emmanuel Lévinas pour ceux qui veulent se familiariser avec la pensée originale et exigeante de l'auteur de Totalité et infini, les dix entretiens : Bible et Philosophie, Heidegger, L'Il y a , La solitude de l'être, l'amour et la filiation, Secret et Liberté, Le visage, La responsabilité pour autrui, La gloire du témoignage, La dureté de la philosophie et les consolations de la religion,  suivent le développement de la pensée de Lévinas depuis ses années de formation jusqu'aux articles consacrés à la question de Dieu, réunis en recueil dans De Dieu qui vient à l'idée (Vrin, 1982), en passant par deux œuvres brèves mais importantes : De l'existence à l'existant, Le Temps et l'Autre, et les deux œuvres philosophiques majeures : Totalité et Infini et Autrement qu'être ou au-delà de l'essence.

Ce livre d'initiation au "philosophe de l'éthique" complète celui de Salomon Malka Lire Lévinas, paru aux éditions du cerf.

Philippe Nemo : Comment commence-t-on à penser ? Par des questions qu'on se pose à soi-même et de soi-même, à la suite d'événements originels ? Ou par les pensées et les œuvres avec lesquelles on entre d'abord en contact ?

Emmanuel Lévinas : Cela commence probablement par des traumatismes ou des tâtonnements auxquels on ne sait même pas donner une forme verbale : une séparation, une scène de violence, une brusque conscience de la monotonie du temps. C'est à la lecture des livres - pas nécessairement philosophiques - que ces chocs initiaux deviennent questions et problèmes, donnent à penser. Le rôle des littératures nationales peut être ici très important. Non pas qu'on y apprenne des mots, mais on y vit "la vraie vie qui est absente", mais qui précisément n'est plus utopique. Je pense que dans la grande peur du livresque, on sous-estime la référence "ontologique" de l'humain au livre que l'on prend pour une source d'informations, ou pour un "ustensile" de l'apprendre, pour un manuel, alors qu'il est une modalité de notre être. En effet, lire, c'est se tenir au-dessus du réalisme - ou de la politique - , de notre souci de nous-mêmes, sans en venir cependant aux bonnes intentions de nos belles âmes, ni à l'idéalité normative de ce qui "doit être"....

"Le moi humain est-il premier ? N'est-il pas celui qui, au lieu de se poser, se doit d'être "déposé" ? Le véritable sens de la subjectivité ne consiste-t-il pas à être, plutôt que substance, dévouement à autrui et, ainsi, assujettissement au prochain ? Est-ce que cet assujettissement n'est pas négation de la liberté qui, semble-t-il, est la véritable définition de l'humain ? Mais on doit se demander si la possibilité pour la non-liberté que suggère le dévouement à autrui de ne pas être asservissement, n'est pas précisément l'obéissance à Dieu. Si Dieu n'est pas cet autre - ou ce tiers exclu -, qui rompt avec l'alternative, libre ou pas libre. Et par conséquent, si, à partir de cette mise en question de soi-même par autrui dont je viens de parler - et qui n'est pas vécue comme une oppression - ne commence pas la voie où le mot "Dieu" prend sens, où Dieu "vous vient à l'idée". Voilà le tissu d'Autrement qu'être qui m'a demandé un langage plus compliqué, philosophique, mais dont la simplicité sous la forme que je viens d'évoquer ne m'est visible qu'après coup." (Salomon Malka, Lire Lévinas, Entretien avec Emmanuel Lévinas, éditions du cerf, pg. 109)

"C'est dans la mesure où je dis que le commandement de Dieu à partir du visage d'autrui est autre chose et mieux qu'une thématisation, qu'on peut être tenté de dire que j'ai une religion sans Dieu (...) Ce que je cherche, c'est le premier moment de "l'épiphanie". Le Dieu de Nietzsche qui est mort est celui qui intervenait dans le monde comme les autres forces du monde et qu'il fallait orienter comme ces forces." (ibidem, pg. 113)

 

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :