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Karen Blixen, Le festin de Babette

Karen Blixen, Le Festin de Babette et autres contes (Skoebne Anekdoter), traduit du danois par Alain Gnaedig et Marthe Metzger, Gallimard 2008

Descendante d’une famille patricienne du Danemark, la baronne Karen von Blixen-Finecke (née Karen Christentze Dinesen) est née en 1885 près de Copenhague. Elle part en 1914 pour le Kenya afin d'y diriger avec son mari une plantation de café. Après une série d'échecs, elle rentre en Europe en 1931 et se retire dans la demeure familiale de Rungstedlund, où elle se consacre à l'écriture jusqu'à sa mort en 1962. Des titres comme Le festin de Babette et Contes d'hiver la rendent célèbre, mais ce sont ses années en Afrique qui lui inspirent son chef-d'oeuvre : la ferme africaine. Publié pour la première fois en 1937, il devient après la Seconde Guerre mondiale un best-seller international et sera adapté au cinéma par Hollywood.

Le roman : 

Babette est une Française devenue domestique en Norvège, après la Commune qui l'a contrainte à l'exil. Ses patronnes sont deux vieilles filles austères. Le jour où elle gagne dix mille francs or à une loterie, elle leur demande de la laisser préparer un dîner fin, dans la grande tradition française. Sa fortune y passe, mais une soirée aura effacé des années de carême. (source : babelio)

L'adaptation cinématographique : 

Dans le Festin de Babette, un film danois de Gabriel Axel avec Stéphane Audran,  tiré d'une nouvelle de Karen Blixen, une cordon bleu accomplie, réfugiée dans un petit village du Jutland, après l'écrasement de la Commune de Paris, confectionne un "repas français de douze couverts" pour reconstituer en une seule soirée les fastes de la grande cuisine parisienne : soupe de tortue géante, blinis Demidoff, cailles en sarcophage... 

Le menu du festin de Babette :

Soupe de tortue géante
Blinis Demidoff (blinis au caviar et à la crème)
Cailles en sarcophage au foie gras et sauce aux truffes
Salade d’endives aux noix
Fromages
Baba au rhum et salade de fruits glacés
Fruits frais (raisins, figues, ananas...)

Les vins :

Xérès amontillado avec la soupe
Champagne Veuve Clicquot 1860, accompagne les blinis
Clos de Vougeot 1845 avec cailles et fromages
Fine Champagne

Eau avec les fruits

Café
 

... A cette occasion, les invités, après n'avoir été, comme le dit Brillat-Savarin que de simples "consommateurs", deviennent peu à peu des "convives"... Les yeux se mettent à briller, les joues se colorent, les langues se délient, des sourires éclairent les visages, des mots enfouis franchissent les lèvres ... On se dit ce que l'on n'a jamais osé se dire... Babette a l'art de transformer un repas en "histoire d'amour".

Et l'on se séparera dans la nostalgie des occasions perdues, mais inexplicablement heureux et transformés par l'accès, à travers la grande cuisine, cette métaphore de la grande littérature, à ce qu'il faut bien appeler la "grâce".

Pour Brillat-Savarin, manger est un acte essentiellement culturel, il est lié à la sociabilité et à la transformation de la nourriture : on ne mange pas n'importe quoi, n'importe où, n'importe comment, avec n'importe qui.

L'anthropologue Claude Lévi-Strauss a montré dans Le cru et le cuit que la cuisine était une manifestation essentielle de la culture humaine, au même titre que le langage, la technique, l'art ou la religion : il n'existe aucune culture dans laquelle on ne transforme la nourriture en l'accommodant et en la faisant cuire ; beaucoup de cultures sont marquées par des "interdits alimentaires" : par exemple, on ne doit pas manger de viande de porc, on doit tuer les animaux d'une certaine manière... L'acte alimentaire prend ainsi une dimension rituelle, religieuse. La préparation de la nourriture, les interdits alimentaires sont des phénomènes liés à la culture ; ils sont à la fois universels et différents d'une culture à l'autre.

Les plaisirs humains ne sont pas tous liés à des satisfactions biologiques. Une oeuvre d'art, par exemple, ne satisfait aucun besoin. Selon Hegel (philosophe allemand du début du XIXème siècle, contemporain de Napoléon Ier), l'art témoigne du fait que l'existence humaine ne se réduit pas à la survie biologique, que l'homme a aussi des besoins spirituels. "L'âme est le cri de la chair"

Eloge de la gourmandise

« La gourmandise est un des principaux liens de la société. » Sous le rapport de l’économie politique, la gourmandise est le lien commun qui unit les peuples par l’échange réciproque des objets qui servent à la consommation journalière.

C’est elle qui fait voyager d’un pôle à l’autre les vins, les eaux-de-vie, les sucres, les épiceries, les marinades, les salaisons, les provisions de toute espèce, jusqu’aux œufs et aux melons.

C’est elle qui donne un prix proportionnel aux choses qui sont médiocres, bonnes ou excellentes, soit que ces qualités leur viennent de l’art, soit qu’elles les aient reçues de la nature. C’est elle qui soutient l’espoir et l’émulation de cette foule de pêcheurs, chasseurs, horticulteurs et autres, qui remplissent journellement les offices les plus somptueux du résultat de leur travail et de leurs découvertes.

C’est elle enfin qui fait vivre la multitude industrieuse des cuisiniers, pâtissiers, confiseurs et autres préparateurs sous divers titres, qui, à leur tour, emploient pour leurs besoins d’autres ouvriers de toute espèce, ce qui donne lieu en tout temps et à toute heure à une circulation de fonds dont l’esprit le plus exercé ne peut ni calculer le mouvement ni assigner la quotité. […]

La gourmandise est un des principaux liens de la société ; c’est elle qui étend graduellement cet esprit de convivialité qui réunit chaque jour divers états, les fond en un seul tout, anime la conversation, et adoucit les angles de l’inégalité conventionnelle.

BRILLAT-SAVARIN, Physiologie du goût, p. 145-147, © Champs-Flammarion, 2001.

Deux recettes  du festin de Babette : 

Blinis Demidoff

pour 8 personnes Temps de préparation : 3 heures (temps de repos compris) temps de cuisson : 15 minutes

Ingrédients :
1/2 pain de levure fraîche ou 1/2 paquet de levure sèche
1 tasse de lait tiède ou chaud mais pas bouilli 1 + 1/2 tasse de farine
2 jaunes d'œufs battus légèrement
1/4 tasse de crème épaisse
1 pincée de sel
2 blancs d'œufs battus rapidement presque en neige
1 cuillère à soupe de beurre doux
1 tasse de crème fraîche ou crème aigre

125 g de caviar ou plus selon les goûts

  1. Dans un grand bol, dissoudre la levure dans lait. Rajouter 1 tasse de farine et battre jusqu'à ce que le mélange soit lisse. Couvrir avec un tissu propre dans un endroit tiède pour lever pendant 2 heures.
  2. Ensuite faire un puits et mettre les jaunes d'œufs, la crème et la 1/2 tasse de farine restante. Ajouter le sel et les blancs en neige sans casser les blancs. Couvrir encore et laisser pendant 30 à 40 minutes (il faut que le mélange soit léger).
  3. Placer un poêlon à fond épais ou une tôle sur le feu moyen et ajoute le beurre. En utilisant une cuillère à soupe, former des blinis d'environ 7 cm avec le mélange obtenu et levé. mettre plusieurs blinis en même temps dans le poêlon. Les faire dorer de chaque côté. Quand les blinis sont prêts, les mettre sur une plaque chauffante
  4. Servir 3 à 4 blinis par assiette avec de la crème fraîche et le caviar.

Cailles en sarcophage

Pour 8 personnes. Temps de préparation : 3 heures, temps de cuisson : 1 h 30 en plusieurs étapes

Ingrédients :
500 g de pâte feuilleté
1 jaune d'œuf battus avec 2 cuillères à soupe d'eau
8 cailles désossées (à l'exception des jambes et des ailes), réserver les os
sel, poivre moulu fraîchement
6 cuillères à soupe de Cognac
75 g de truffes noires hachées
250 g de foie gras d'oie frais de préférence (mais pas crus )
5 cuillères à soupe de beurre sans sel
3 échalotes hachées
1 tasse de vin blanc sec
4 tasses de fond de volaille
2 cuillères à thé de maïzena dissoutes dans 2 cuillères à soupe de vin blanc
8 gros champignons avec de grands et parfaits chapeaux (quelle précision!)
1 cuillère à thé d'huile d'arachide

  1. Préchauffer le four à 200 °C. Couvrir la plaque de papier sulfurisé.
  2. Rouler la pâte sur une planche légèrement fariné jusqu'à 6 mm d'épaisseur et découper en 8 ovales de 10 cm de large et de 12,5 cm de long. Piquer avec les dents d'une fourchette et badigeonner avec le jaune d'œuf + eau.
  3. Cuire 12 à 15 mn pour dorer légèrement . Sortir du four pour refroidir. Avec un couteau aiguisé découper le côté sans couper le fond et enlever les couches intérieures pour former un ovale creux
  4. Rincer et sécher les cailles, saupoudrer les cavités de sel, poivre et un peu de Cognac, ainsi que les truffes. Partager le foie gras en 8 portions et placer dans chaque caille. Fermer les cailles en haut avec de la ficelle de cuisine. Mettre les cailles au réfrigérateur jusqu'à la cuisson.
  5. Faire chauffer une cuillère à soupe de beurre dans une casserole à fond épais. Ajouter les os réservés et faites dorer légèrement. Ajouter les échalotes, baisser le feu, remuer constamment pendant 3 minutes. Ajouter 3 cuillères à soupe de Cognac et le fond de volaille et déglacer la casserole. Laisser mijoter 30 à 40 minutes pour réduire la sauce. Passer la sauce et mettre la maïzena, mélanger. Remettre dans une casserole propre et remuer jusqu'à épaississement. Ajouter le reste de truffes, sel, poivre.
  6. Faire sauter les chapeaux des champignons dans 2 cuillères à soupe de beurre. Réserver.
  7. Environ 20 minutes avant de servir, préchauffer le four à 175-180 °C.
  8. Chauffer le reste de beurre et l'huile dans une poêle à fond épais à feu moyen, faire dorer les cailles de tous les côtés environ 5 minutes. Mettre les cailles au four 10 minutes.
  9. Pendant ce temps, déglacer la poêle avec le Cognac restant (environ 2 cuillères à soupe ) et ajouter cela à la sauce.
  10. Sortir les cailles du four, enlever la ficelle et les garder au chaud.
  11. Pour servir , réchauffer la sauce.
  12. Placer les ovales sur une plaque et mettre une caille sur chaque, mettre à réchauffer dans le four 5mn. Dresser dans les assiettes et mettre une cuillère de sauce sur chaque caille et dans l'assiette et placer les chapeaux des champignons en haut de chaque caille. Servir de suite.
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