Mikkel Birkegaard, La librairie des ombres

Mikkel Birkegaard, La librairie des ombres (Libri di Lucca), traduit du danois par Inès Jorgensen, 10/18 "domaine policier", Fleuve noir, 2010

Auteur danois né en 1968, Mikkel Birkegaard vit à Copenhague. Son premier livre, The Library of Shadows (La Librairie des ombres) devint, à sa sortie en 2007, un best-seller au Danemark. Death Sentence, son second roman, publié en 2009, obtint le même succès. Son dernier roman, From the Book of Dreams a été publié au Danemark en avril 2012. Le thème central des romans de Bierkegaard est l'amour des livres et des histoires qu'ils racontent ; il associe des récits à suspens, ponctués de références aux  grands noms de la littérature contemporaine,  à une méditation sur la connaissance, sur fond de mystère et de merveilleux.

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"Nichée au coeur de Copenhague se trouve une vieille librairie au nom italien: Libri di Luca.

Son propriétaire, Luca Campelli, vient de mourir de manière très abrupte et pour le moins... étrange. C'est Jon, son fils, avec qui il a rompu tout contact depuis 20 ans, qui hérite du magasin.

Entraîné malgré lui dans l'histoire familiale, Jon découvre bientôt que cette librairie renferme un secret fabuleux. Son père était en fait à la tête d'une société de "lettore", des personnes dotées d'un pouvoir exceptionnel leur permettant d'influencer la lecture des autres, de créer des mondes merveilleux, de donner naissance à des histoires extraordinaires... mais aussi de manipuler jusqu'au meurtre.

Plus Jon avance dans ses recherches, plus il se persuade que la mort de son père n'a rien de naturel. Dissimule-t-elle une lutte de pouvoirs au sein de cette société secrète? Y a-t-il un traître parmi ses membres? Quelqu'un cherche-t-il à s'emparer de leur don incroyable? Afin de rassembler les morceaux épars de son passé et retrouver les assassins de son père, Jon se lance dans une quête acharnée qui va se révéler risquée...

Et si Luca l'avait volontairement écarté de cette société aussi mystérieuse qu'inquiétante, où les livres ont le pouvoir de changer le cours de la vie ?" (babelio)

Mon avis sur le roman :

Cervantès a montré que les livres pouvaient exercer sur nous une influence ambivalente, mais bien réelle, bénéfique ou maléfique : nous rendre meilleurs et plus lucides ou obscurcir notre intelligence et nous amener à agir de manière déraisonnable, voire criminelle.

Personne, à ma connaissance, sauf peut-être Umberto Eco dans Le Nom de la Rose, n'avait eu l'idée que le meurtrier puisse être un livre. Dans les deux cas, ce sont des hommes qui agissent à travers les livres, mais dans La Librairie des Ombres, le modus operandi, psychologique et non "chimique" comme dans Le Nom de la Rose,  est bien plus subtil et bien plus élaboré.

Les romans policiers débutent généralement par un crime inexplicable et se terminent par la résolution rationnelle d'une énigme aux apparences surnaturelles, l'archétype étant le "crime en chambre close". Ici, c'est exactement le contraire : le rationnel débouche sur le surnaturel.

D'habitude, je n'aime pas trop le fantastique, sauf quand on peut hésiter entre deux interprétations, et n'en déplaise à Todorov, ce n'est pas toujours le cas. Mais ici, l'auteur réussit à rendre presque plausible la dimension surnaturelle, ce qui ne va pas sans créer un délicieux frisson d'angoisse.

J'ai acheté La Librairie des Ombres d'occasion et un peu par hasard... A moins que... Pouvais-je résister à un roman policier dont le héros, en feuilletant le livre, se révèle être un lecteur de Kierkegaard ? Je vais finir par y croire, moi aussi, à l'existence des "Lettore"...

... Peut-être en suis-je un sans le savoir, comme Jon,  le héros-détective, au début du roman, et peut-être en êtes-vous un aussi, frère lecteur ou frère lectrice, membre d'une confrérie de plus en plus réduite : celle des gens qui lisent encore des livres... et dont certains - pourquoi pas vous ? -  ont le "don".